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Juin 23

La fausse bonne idée de vendre de la pub à Espace Musique et Radio 2

(Par Simon Forgues) – Vendre de la publicité à Espace Musique et Radio 2 coûte sans doute plus cher à la Société d’État que ce qu’elle en retire.

C’est triste d’y penser mais il faut se dire les vraies affaires.

Pourtant, la Société Radio-Canada (SRC) croyait avoir trouvé un filon quand elle a demandé au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTCCRTC Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) est l’organisme public indépendant qui réglemente les secteurs de la radiodiffusion et des télécommunications au Canada.) de vendre de la publicité nationale à l’antenne d’Espace Musique et Radio 2, ses deux chaînes musicales francophone et anglophone.

Or, c’était ce que certains appelleraient une fausse bonne idée. Vous savez, ce petit éclair de génie qui n’en est finalement pas un.

On apprend, deux bonnes années après la décision du CRTC, que les revenus publicitaires des deux chaînes musicales sont nettement inférieurs à ce qui avait été initialement prévu. L’organisation estimait pouvoir engranger des revenus de 10 M$ grâce à la vente de temps d’antenne, mais ce n’est finalement qu’un maigre million de dollars (1,1 M$) qui fut récolté.

Un million quand on en attendait dix, c’est… Oui, c’est dix fois moins.

À l’ARC du Canada, nous n’étions pas très chauds à l’idée de voir le diffuseur public s’accaparer une pointe de la tarte publicitaire déjà passablement consommée et avions même été livrer nos inquiétudes devant les conseillers du CRTC.

Nous ne sommes pas davantage convaincus de la pertinence de cette idée aujourd’hui, même s’il faut admettre que les résultats ne sont pas aussi impressionnants que ce qu’on anticipait.

Quand la décision avait été rendue par le CRTC, j’avais alors écrit un texte intitulé « Nous interrompons ce menuet de Mozart pour de la publicité ! » où j’expliquais que le Conseil estimait lui-même que l’arrivée de la publicité allait marquer un virage dont il allait être difficile de mesurer les effets.

Deux ans plus tard, le diffuseur public semble vouloir persister à vendre davantage de temps d’antenne pour générer des revenus. Et, si vous voulez mon humble avis, j’ai encore et toujours la même désagréable impression qu’il ne s’agit pas de la voie à emprunter.

La planche de salut du diffuseur public passerait-elle, par exemple, par la monétisation de sa plateforme Web, un peu comme ce qu’elle a mis en place pour son service de vidéo à la demande ICI Tou.tv ?

Une offre à 4 ou 5 $ par mois pour une bonification de son offre numérique, comme l’écoute hors ligne par exemple ? Je ne saurais le dire.

Ce que je sais en revanche, et c’est mon opinion bien personnelle, c’est qu’il doit y avoir chez le diffuseur public une réflexion beaucoup plus approfondie quant à la pertinence et la faisabilité de vendre de l’espace publicitaire à l’antenne de chaînes musicales comme celles-là.

Force est d’admettre que, d’une part, on a visiblement surestimé la capacité d’Espace Musique et Radio 2 de générer des revenus grâce à la publicité, et que, d’autre part, il ne s’agit pas d’un exercice qu’on improvise à la hâte.

Si la SRC/CBC n’a réussi qu’à réaliser 1,1 M$ de ventes publicitaires alors qu’elle estimait pouvoir en tirer jusqu’à dix fois plus, je ne vois pas de quelle façon elle atteindra cette objectif même avec la meilleure volonté du monde.

J’ose au moins croire que personne n’aura une autre fausse bonne idée de demander au CRTC la permission de vendre de la publicité locale et provinciale. Je croise les doigts très fort. S’il fallait.

Selon vous, comment Radio-Canada pourrait-elle générer davantage de revenus autonomes pour compenser le manque à gagner dans ses revenus provenant du gouvernement ?

À propos de l'auteur

Professionnel du domaine des médias électroniques avec plus de 30 ans d'expérience, Simon Forgues est à l'emploi de l'Alliance des radios communautaires du Canada depuis 2007. Diplômé en animation radio et télévision au Collège Radio Télévision de Québec, il possède aussi une attestation d'études en création de podcast du Collège Bart. Impliqué dans de nombreux projets liés à la radiodiffusion, et ce, de l'idéation de contenu jusqu'à la production, il a œuvré dans différentes radios du Québec et de l'Ontario, où il a cumulé également des tâches liées à la coordination musicale et à la programmation.