Facebook n’a pas 2 milliards d’abonnés, comme le claironnait récemment Mark Zuckerberg.
Cette statistique est pourtant reprise par de nombreuses publications sans la remettre en question, alors qu’en réalité, elle serait sans doute plus proche des 1,5 à 1,6 milliard, selon moi.
Je n’ai pas la prétention d’avoir la vérité absolue, mais essayons quand même d’y voir plus clair…
En partant, les chiffres de Messenger me laissent déjà songeur
Dans le tableau de Statista ci-dessus, l’on constate que Messenger compterait approximativement 1,2 milliards d’utilisateurs. Messenger, pour ceux qui l’ignorent, c’est le service de messagerie de Facebook.
Donc si l’on se fie à ces statistiques, il y aurait un écart de 800 millions entre les abonnées Facebook et ceux d’entre eux utilisant la messagerie instantanée Messenger. Honnêtement, je trouve ça beaucoup.
Ça fait que sur 2 milliards d’abonnés Facebook, presque la moitié (800 millions) n’utiliseraient jamais Messenger pour contacter gratuitement et instantanément leurs proches et amis?
Facebook, une usine à profils frauduleux
À soustraire des 2 milliards dès le commencement, il y a les profils frauduleux.
Ils n’ont ni lieu ni date de naissance, pas de statut marital, pas de travail. Pourtant, ils s’abonnent à des pages et aiment leurs publications.
Pourquoi existe-t-il? Pour frauder. Facebook est LE paradis des comptes fictifs. Normal, puisque c’est le plus gros réseau social.
Les fermes à clics (en anglais des click farms) sont des entreprises frauduleuses où la main-d’oeuvre bon marché s’active quotidiennement à créer de faux comptes pour grossir le nombre d’abonnés de pages et de célébrités présentes sur Facebook afin d’aimer leurs publications.
Il y a encore quelques jours, la police thaïlandaise procédait au démantèlement d’une ferme à clics où des centaines de téléphones portables et des milliers de cartes SIM étaient accrochés aux murs et utilisés pour des activités illicites.
Créer un faux compte Facebook est facile comme 1, 2, 3
Créer un faux profil Facebook prend tout au plus quelques instants. La fraude est érigée en système; la procédure est disponible en ligne sur Internet.
Ça prend simplement 1) une adresse de courriel factice, et pour ça il existe de nombreux services de courriel temporaire en ligne; 2) un numéro de téléphone fictif, et pour ça il existe également des services en ligne où recevoir des SMS sans téléphone portable.
En restant conservateur, je dirais qu’il doit y avoir de 8 à 10 % des utilisateurs Facebook qui sont de faux profils.
À peu près 200 millions de faux profils créés de toutes pièces pour alimenter le commerce des faux clics.
Ce n’est sans doute pas très loin de la réalité, puisque l’entreprise elle-même avait offert un pourcentage à peu près similaires aux miens lors de son introduction en bourse en 2012. Sur les 955 millions d’utilisateurs que comptait Facebook à ce moment-là, la compagnie estimait qu’à peu près 83 millions (8,7 %) étaient faux.
Rendus 5 ans plus tard et avec 2 milliards de profils au compteur, je pense que mon estimation de 200 millions tient la route.
Les animaux de compagnie, les bébés et les célébrités décédées
Autre phénomène propre à Facebook, je les appellerai les « faux vivants ».
Ce ne sont pas de faux profils à proprement parler. Derrière ces identités se cachent de réels êtres vivants ou décédés, et de vraies personnes pour alimenter ces comptes.
Or, ils ne devraient pas être comptés comme des utilisateurs mais plutôt comme des pages ou, mieux encore, carrément des groupes privés.
Là, je vais peut-être vous décevoir, mais malgré tout l’amour que vous avez pour les adorables petites boules de poils que sont les chatons et les cochons d’Inde, aucun d’entre eux n’est encore capable de tenir à lui seul un compte Facebook.
Ajoutez-y les John F. Kennedy et Marilyn Monroe disparus depuis des décennies, ou pis encore, Jésus de Nazareth mort depuis des milliers d’années, et vous venez encore de grossir les rangs des « faux vivants » de Facebook.
Même chose pour les bébés naissants qui entretiennent déjà (eux-mêmes bien sûr!) leur propre album de photos. Des surdoués, on s’en doute.
Ce n’est pas de la mauvaise foi
Les gens qui tiennent ces comptes Facebook ne sont pas forcément malicieux, contrairement aux click farms. Sauf qu’ils ne devraient pas être comptabilisées dans les statistiques Facebook.
Vite comme ça, si je devais donner une estimation du phénomène des « faux vivants » je dirais qu’à travers le monde, on doit pouvoir compter sans doute entre 100 et 150 millions de « faux vivants ». Des chats, des chiots, des bébés naissants, des acteurs disparus, bref de « faux vivants » comme je les appelle.
Ils vivent ou ont déjà vécu, mais ils peuvent difficilement tenir eux-mêmes un compte Facebook, on s’entend là-dessus.
Les doublons, soit deux comptes pour la même personne
Enfin, dernière catégorie et non la moindre, les doublons. Combien de célébrités ont 2 comptes Facebook? Un profil pour mener leurs relations publiques et l’autre pour garder contact avec les proches.
De ceux-là, je dirais qu’on peut en soustraire sans doute 25 à 50 millions.
Qu’est-ce qui me fait dire ça? 50 millions, c’est beaucoup, non?
C’est que même le commun des mortels se crée maintenant plusieurs identités Facebook. Un compte pour s’afficher à papa, maman, cousin, oncles et voisins. L’autre compte qu’on montre aux patrons et collègues.
J’ai une connaissance qui a pas moins de 4 comptes Facebook. Vous avez bien lu.
Un compte pour la famille, un 2e pour les affaires, puis un 3e pour d’anciens « amis » d’école et collègues avec lesquelles elle reprend contact sans nécessairement partager avec eux certains côtés de son existence. Le dernier? Pour son minou.
Le compte final
Alors, à combien sommes-nous rendus de profils Facebook qui ne devraient pas être comptabilisés en réalité, selon mes estimations?
À peu près 400 millions.
En les soustrayant des chiffres avancés par Zuckerberg, nous sommes rendus à 1,6 milliards d’utilisateurs.
Je répète que je n’ai pas la vérité absolue et qu’on ne saura sans doute jamais le chiffre réel. Sauf qu’entre vous et moi, c’est sans doute beaucoup plus logique que les 2 milliards d’abonnés supposés.
Donc, la prochaine fois que vous lirez ou entendrez dire qu’environ 1 être humain sur 3 est présent sur Facebook, rappelez-vous que Jésus a été cloué en croix il y a plus de 2 000 ans, mais qu’il compte encore aujourd’hui des dizaines de sosies dans Facebook.
Et puis, d’accord ou pas avec mes chiffres?
Excellent article qui remet les chiffres officiels en cause. Je vais reprendre le chiffre d’environ 1.5 milliards plutôt que le chiffre de 2 milliards dans mes conseils pour l’utilisation de Facebook. Merci
27 juillet 2018. Un an après ce texte paru en 2017.
Avec ce qui se passe depuis +/- 36 à 48 heures avec le titre de Facebook à la bourse NASDAQ, alors que la valeur de l’entreprise a fondu d’à peu 1/5e, j’ai tendance à croire qu’on peut effectivement retrancher un bon 20-25 % aux pretentions de Zuckerberg quant au nombre d’abonnés, et ce, sans trop faire d’erreur.
Ce sont finalement les hommes de Wall Street qui l’auront ramené à la raison. Ironiquement.