Devrions-nous offrir des cours obligatoires d’éducation aux médias sur les bancs d’école ? Plusieurs le croient déjà; la crise de la COVID-19 nous y forcera peut-être.
Récemment, le Secrétaire général des Nations Unies s’inquiétaient que le phénomène des fausses informations soit en train de menacer l’humanité.
Normand Landry, professeur à la TÉLUQ, suggérait quant à lui en 2015 qu’on devrait réfléchir à l’instauration d’un cours obligatoire d’éducation aux médias pour tous les futurs enseignants.
Il allait même jusqu’à parler de formation continue, « car les technologies et les usages changent sans arrêt. »
En lisant cette réflexion, j’ai presque hurlé de joie. Bon, j’exagère sans doute un peu. Par contre, j’irais plus loin.
Et pourquoi pas toute la société ?
Personnellement, j’estime que toute la société aurait volontiers besoin de cours obligatoires en la matière.
Parce que nous sommes tous devenus des médias en quelque sorte.
Chaque fois que nous interagissons dans les médias sociaux et véhiculons de l’information, nous sommes des producteurs et des diffuseurs de contenu.
Et tous autant que nous sommes, nous entretenons pour ainsi dire une « image de marque », ainsi qu’une influence auprès d’un public petit ou grand.
Dans une crise comme celle que nous vivons, avec des quantités phénoménales d’informations qui sont véhiculées à l’échelle du globe, il serait grand temps qu’on sache trier le bon grain de l’ivraie.
Une expérience troublante mais révélatrice
Quand des vedettes profitent de leur popularité pour colporter des théories boiteuses et qu’un président dit tout et son contraire dans la même conférence de presse, on a le droit de se poser des questions. C’est légitime.
D’ailleurs, distinguer les vraies infos des fausses, ça devrait devenir un réflexe.
Comme de savoir qu’un gros bouton rouge avec du pus qui nous sort dans le milieu du front n’est jamais un très bon signe.
Ça bouge vite l’actualité, particulièrement à l’ère des médias sociaux. Il faut savoir reconnaître le pus et crever les abcès.
Un exemple…
En juin 2016, un site Web publie l’article « Study: 70% of Facebook users only read the headline of science stories before commenting » (Traduction : 70 % des utilisateurs de Facebook ne lisent que les titres des actualités scientifiques avant de les commenter).
Or, le site en question, The Science Post n’est autre qu’un média satirique. L’auteur ? SP Team.
Science, Health, Satire. Telle est sa devise en toutes lettres. Il me semble que ça devrait nous sonner une cloche quand on est intelligent.
Et dans le bas du site, on lit : « All stories are made up. » (Traduction : Toutes les histoires sont inventées.)
Hé bien ! Savez-vous à combien de reprises l’article a été partagé et commenté ?
Plus de 126 000 fois au moment où j’écris ces mots. Troublant.
Loin de se calmer, les gens continuent de partager et de débattre même encore aujourd’hui. Souvent sans avoir lu l’article qui ne repose sur aucune valeur scientifique.
Le plus ironique ? À part le titre et l’accroche de la nouvelle, tout le reste de l’article est un faux-texte en latin, autrement appelé du lorem ipsum.
Faisons tous notre part
Bien sûr, certains l’ont repartagé avec humour sachant fort bien qu’il s’agissait d’un canular. Je m’en doute. Le compteur lui-même est peut-être gonflé, allez donc savoir.
N’empêche, plusieurs l’ont partagé et commenté machinalement sans même en avoir pris connaissance.
Je l’avais même déjà vu passer parmi mes cercles de connaissances. (Chut! Je ne le dirai pas trop fort; c’est presque gênant.)
Combien de théories conspirationnistes circulent ainsi à propos des origines du SRAS-CoV-2 (COVID-19), de l’implication de tel pays ou tel autre dans sa “fabrication” en laboratoire, ou encore de faux remèdes pour en guérir ?
Sommes-nous si dépassés par les événements au point d’avoir perdu tout esprit critique ? Le peu de génie qui nous sert à analyser une information avant de lui accorder du crédit.
Je suggère qu’une fois la pandémie derrière nous, on réfléchisse aux manières de ralentir non seulement la propagation des virus mais aussi des fausses informations qui pullulent en ligne.
Peut-être en commençant à la petite école, tiens. On y gagnerait tous. Non ?
(Photo d’en-tête : Simon Forgues)
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